Les plantes sont intelligentes ! C'est l'idée que S. Mancuso et A. Viola veulent nous faire intégrer à travers leur ouvrage. Une idée que vous trouvez peut-être saugrenue mais après tout, quand Galilée ou encore Copernic proposaient leurs idées, les gens les trouvaient tout aussi inacceptables ! Alors, pourquoi ne pas changer de vision collective et accepter cette nouvelle représentation du monde ?
Depuis
quelques années, la préservation de la nature est devenue une priorité. Tous,
dans notre quotidien, réalisons qu’il faut agir et vite pour ne pas aggraver la
situation de la planète mais il faut aussi l’améliorer et donc trouver des
solutions pour y parvenir. Les plantes, représentant, selon les estimations,
entre 95,5% et 99,5% de la biomasse de la Terre, sont à la base de bon nombre
de nos médicaments et sont surtout indispensables à notre vie puisqu’elles
permettent de produire l’oxygène présent dans l’air. Elles pourraient être une
solution à nos problèmes écologiques mais pour cela, il faudrait correctement
les appréhender.
Mais
alors, comment expliquer qu’on ne connait que très peu de choses sur ces
plantes qui nous semblent si familières ? Je suppose aussi que si je vous
demande un mot pour qualifier les plantes, vous diriez sûrement des mots comme
vert, végétal, immobile… mais probablement pas intelligence et c’est ce que S.
Mancuso et A. Viola veulent nous faire intégrer grâce à leur ouvrage : les
plantes sont intelligentes ! Une idée que vous trouvez peut-être saugrenue
mais après tout, quand Galilée ou encore Copernic proposaient leurs idées, les
gens les trouvaient tout aussi inacceptables ! Alors, pourquoi ne pas
changer de vision collective et accepter cette nouvelle représentation du
monde ?
Aujourd’hui,
nous allons donc nous pencher sur leur ouvrage : Brilliant Green :
The Surprising History and Science of Plant Intelligence, que vous pourrez
retrouver en français sous le nom de L’Intelligence des Plantes aux éditions
Albin Michel. Un ouvrage philosophique, botanique et d’actualité !
Qu’importe votre âge, vous y trouverez votre bonheur !
Des
plantes… intelligentes ? Evidence pour certains, absurdité pour
d’autres !
Dans
leur ouvrage, Mancuso et Viola se donnent la responsabilité de démontrer
l’existence d’une intelligence des plantes mais aussi et surtout, d’expliquer
pourquoi un certain scepticisme règne encore aujourd’hui à propos de cette idée,
et même au sein de la communauté scientifique. Stefano Mancuso étant un biologiste
et un professeur de botanique italien. Il s’associe dans cet ouvrage à
Alessandra Viola, une journaliste de vulgarisation scientifique, un très bon
point qui permet à tous de pouvoir lire cet ouvrage et de ne pas décrocher face
à certains termes scientifiques.
Pour
ce faire, les auteurs divisent leur ouvrage en cinq chapitres distincts mais complémentaires.
Le premier chapitre explique que les méfiances et les arguments contre l’idée
d’une intelligence des plantes proviennent uniquement de préjugés et d’influences
culturelles perpétués depuis des milliers d’années. Le deuxième chapitre quant
à lui, explique la principale différence entre les plantes et ceux que la
majorité considèrent comme intelligents, à savoir les êtres humains et les
animaux. Au contraire, le troisième et le quatrième chapitre essayent de
démontrer que les plantes ont bien plus de points communs avec les êtres
humains et les animaux qu’on peut le penser. Enfin, dans l’ultime chapitre, les
auteurs se questionnent sur la notion d’intelligence.
Ainsi,
on peut vraiment dire qu’un des points positifs de cet ouvrage est sa
structure. Elle est claire, titrée et sous-titrée, on peut donc se repérer très
facilement. Les arguments utilisés par les auteurs sont convaincants car ils
les illustrent énormément d’une part, grâce à des exemples scientifiques (anecdotes,
expériences…) et d’autre part grâce à certaines analogies du quotidien qui
permettent de percuter le lecteur. En effet, dans un cas comme celui-ci où les
auteurs, à travers leur ouvrage, doivent convaincre le lecteur sur un sujet où
comme nous l’avons dit auparavant, le scepticisme règne, l’usage d’analogies
est nécessaire et pertinent car il permet au lecteur de se comparer aux plantes
et donc de les placer au même niveau que lui. C’est d’autant plus pertinent et
judicieux que l’ouvrage permet de se questionner sur l’anthropocentrisme.
Une
prise de conscience qui passe par une remise en question de notre mode de
réflexion ?
En
effet, la question de l’anthropocentrisme est un des grands enjeux de cet
ouvrage comme le mentionne Michael Pollan dans la préface de l’ouvrage. Michael
Pollan étant un journaliste et essayiste américain qui écrit articles et
ouvrages sur des sujets variés. Le seul critère est que « nature et
culture se croisent ».
Dans
le premier chapitre, les auteurs vous expliqueront pourquoi l’idée que les
plantes sont inférieures aux autres espèces, humaines et animales, est ancrée
dans la culture occidentale. Vous y découvrirez alors des explications
provenant de domaines variés et d’époques variées. C’est donc un chapitre
extrêmement riche que nous proposent Mancuso et Viola. Ils commencent par nous
dévoiler des raisons religieuses (seules les religions monothéistes sont prises
en compte). En effet, les religions abrahamiques ne reconnaissent absolument pas
les plantes comme des êtres vivants mais plutôt comme des « inanimate
objects ». Et je suppose que vous aussi vous les percevez comme des objets
inanimés puisque vous utilisez sûrement l’expression « être un
légume » ou encore le verbe « végéter » quand vous ne
faites rien ! Pour vous donner un exemple, savez-vous comment cette idée se
déduit dans la religion islamique ? Eh bien, l’art islamique a
l’interdiction de représenter Allah ou tout autre être vivant, que ce soient
les êtres humains et les animaux. Néanmoins, l’art floral prend une place
majeure au sein de l’art islamique. Les plantes ne sont donc pas perçues comme
des êtres vivants, sinon leur représentation serait formellement
interdite !
D’autres
domaines seront parcourus au sein de ce chapitre pour nous faire découvrir
l’origine de la standardisation de l’idée, selon laquelle les plantes sont des
êtres vivants à part entière. Les domaines parcourus seront alors la
littérature, la philosophie ou encore la science moderne. C’est un choix très
juste des auteurs de commencer par ce chapitre car il permet de nous
débarrasser de notre scepticisme avant d’entrer dans le vif du sujet. Comme on
l’a dit, c’est un chapitre très riche et le surplus d’informations nous
poussent à admettre que nous avons imprégné cette vision des plantes comme des
êtres passifs tout au long de notre vie. Ce choix très judicieux va alors
permettre de lire les autres chapitres qui concernent le mode de vie des
plantes avec moins d’a priori.
L’ouvrage
se poursuit alors en explicitant la principale différence entre les êtres humains,
les animaux et les plantes. Les deux premiers sont considérés par tous comme
« intelligents » mais pas les plantes. Cela s’explique très
simplement : les animaux, tout comme nous, possèdent un unique centre de
commande : chaque mouvement ou information a été intégré ou déclenché par
le cerveau. Pour les plantes, c’est différent et cette différence s’appelle la divisibilité.
En effet, le centre de commande est réparti partout dans la plante. Ainsi, si
on coupe une partie de cette dernière, elle ne mourra pas. Les auteurs expliquent
ce phénomène comme le fonctionnement d’une colonie : les entités
individuelles ne prennent sens uniquement avec un groupe. « One of the cardinal concepts underlying many of
the technologies made possible by the advent of the Internet and based
on the interconnection of groups (such as social networks) ». Selon
les auteurs, cette notion de colonie a donc été possible grâce à l’émergence
d’Internet basé sur les interconnexions de groupes (comme sur les réseaux
sociaux). Or, Internet est un concept très récent, ce qui est étonnant car peu
de temps avant, on nous exposait des faits historiques antiques. On a donc
l’impression que nous ne sommes qu’au début de l’appréhension des plantes et
tout cela parce qu’elles fonctionnent d’une manière différente de la nôtre !
Mais
alors, les plantes sont-elles réellement si différentes de nous ? Mancuso
et Viola nous répondent non, les plantes possèdent les mêmes sens que nous (la
racine étant l’organe ayant le plus de capacités sensorielles même si les
autres en ont, car comme nous l’avons dit précédemment, le centre de commande
des plantes est divisible) et en possèdent même plus que nous (par
exemple : elles sont capables d’analyser de nombreux gradients chimiques
qui lui permettent de savoir s’ils sont importants ou nuisibles à sa
croissance). Leurs sens ont uniquement un autre mode de fonctionnement que
celui que nous possédons.
Les
plantes nous ressemblent mais est-ce que cela suffit pour dire qu’elles sont
intelligentes ? Pour les auteurs, évidemment. Ils utilisent la définition
de l’intelligence suivante : « Intelligence is the ability to solve
problems ». Or, tout au long de l’ouvrage, on nous propose des exemples où
les plantes résolvent des problèmes donc quand au dernier chapitre, cette
définition fait surface, on ne peut qu’accepter l’idée que les plantes sont
intelligentes. Encore une fois, on peut souligner les excellents choix des
auteurs sur l’organisation et la structure de cet ouvrage. Pour vous donner un
des exemples où les plantes résolvent des problèmes pour leurs propres
intérêts : je ne peux que penser à l’orchidée « Ophrys apifera ».
Cette
fleur est capable d’imiter la forme de la femelle d’hyménoptères (très
ressemblant aux guêpes ou aux abeilles) mais également leur odeur, leurs
couleurs… Une ressemblance parfaite qui trompe les mâles qui copulent alors
avec la fleur. Or, lors de la copulation, un mécanisme de l’orchidée inonde le
mâle de pollen dont il ne pourra se détacher directement, ce qui permettra de
polliniser d’autres fleurs. Ainsi, pour être pollinisée, l’orchidée ne manquera
pas d’utiliser des pratiques malhonnêtes. La malhonnêteté étant un terme
utilisé pour les êtres humains, pourquoi ne pourrait-on donc pas utiliser le
terme d’intelligence pour les plantes ?
Je
ne pourrais donc que vous recommander cet ouvrage dont les sources sont riches
et variées (articles ou ouvrages scientifiques) qui permettent des exemples
très précis sur un large panel d’espèces tout au long du livre (des arbres, des
fleurs, des plantes carnivores…, tout y passe !). Le seul petit hic étant
qu’on n’a pas assez d’informations sur les recherches actuelles concernant les
plantes (juste un court passage sur la question du sommeil des plantes). Or,
comme nous l’avons dit précédemment à travers la notion d’internet, nous sommes
au début des recherches sur celles-ci. Mais cela n’est qu’un détail, les
plantes sont fascinantes et cet ouvrage nous le démontre parfaitement !
Un
court article, l’idéal pour se motiver à lire l’ouvrage !
Pour
ceux qui encore besoin d’être convaincu pour lire l’ouvrage de Mancuso et de
Viola, quoi de mieux qu’un court article de vulgarisation scientifique qui
reprend efficacement les thèmes abordés dans l’ouvrage. L’article en question
est un article de Sciences & Vie, Intelligence des plantes : les
secrets de la « cognition végétale ».
C’est
un article bien construit qui commence par nous expliquer la controverse sur
l’intelligence des plantes entre les stricts défenseurs de cette idée et les
plus réticents pour qui la notion d’intelligence ne s’applique qu’au monde
animal. On poursuit par la définition de Darwin sur l’intelligence, à savoir « être
intelligent, c'est avant tout agir intelligemment, sans présupposer les moyens
par lesquels cette action est réalisée ». Cela permet d’introduire l’avis
de nombreux botanistes sur la question, tous favorables à caractériser les
plantes d’intelligentes (notamment S. Mancuso). C’est sûrement ce que je pourrais
reprocher à cet article, il n’expose pas l’avis de ceux qui sont encore
réticents alors qu’ils font parti de la communauté scientifique également. Ainsi,
exposer une controverse revient à traiter les deux partis de la même sorte en
relatant l’intégralité (dans la mesure du possible, surtout pour un article de
vulgarisation) des faits et laisser le lecteur se faire sa propre idée. Or,
ici, on nous incite à intégrer l’idée que les plantes sont intelligentes. C’est
aussi le cas dans l’ouvrage de Mancuso et Viola mais dans ce cas-là, c’est plus
logique car dès le début, on sait qu’on va lire un ouvrage de défenseurs de
cette idée.
Mais retournons à notre
article, qui se poursuit par deux listes : une première s’appelant
« une multitude de comportements intelligents dans le monde végétal »
et une seconde s’intitulant « une intelligence à part dans le règne du
vivant ». On est alors face à un choix pertinent de couper l’article avec
deux listes qui freinent le côté protocolaire de l’article et qui permettent de
mieux retenir le contenu car les phrases sont courtes, succinctes et espacées.
La première liste regroupe alors des éléments sur la coopération, l’entraide,
la sociabilité… Il n’y a qu’une seule phrase pour chaque domaine. Par exemple,
pour le domaine de la coopération, la phrase est « les racines recrutent
champignons, bactéries et même parfois des vers de terre pour mieux extraire
les ressources minérales du sous-sol ». Un unique exemple nous permet de
retenir aisément et de comprendre que la coopération n’est pas qu’un concept
pour le règne animal. Ainsi, si ce concept peut aussi être adapté dans le règne
végétal, pourquoi pas celui de l’intelligence ? La deuxième liste quant à
elle, compare le fonctionnement de la cognition végétale et de la cognition
animale (différence dont on a déjà parlé dans l’ouvrage de Mancuso et Viola).
Enfin, l’article se
clôture sur les recherches actuelles : « des mécanismes cellulaires
de traitement de l’information » sont découverts actuellement. Cela est
permis notamment grâce aux progrès technologiques (imagerie, bio-informatique,
séquençage…). L’axe des recherches actuelles n’étant pas développé dans
l’ouvrage c’est un très bon point d’en parler dans cet article. Etant donné que
c’est un article de vulgarisation scientifique, les informations restent
moindres sur ce sujet, ce qui est totalement normal !
Ce qu’il faut
retenir !
Pour conclure, l’article
vous permettra de découvrir de nombreuses choses sur le monde végétal et même
si c’est un article de vulgarisation, il vous permettra tout de même de vous
questionner sur la question philosophique de l’anthropocentrisme. Néanmoins, si
vous voulez aller plus loin sur les informations données dans cet article, avec
des exemples précis et des termes scientifiques abordables pour tous (grâce à
l’intervention de la journaliste de vulgarisation Alessandra Viola), l’ouvrage
est fait pour vous ! Il vous dévoilera des raisons historiques de la
réticence d’un grand nombre de personnes, vous convaincra également que les
plantes sont intelligentes, vous questionnera aussi sur l’anthropocentrisme et
enfin, vous pourrez même vous confrontés au potentiel des plantes pour résoudre
les questions écologiques actuelles ! Alors, désormais, n’attendez plus et
plongez-vous dans ces deux très belles lectures !
Chanel SARTORI – CPES 1B
Sources :
Brilliant Green : The Surprising History and
Science of Plant Intelligence,
Stefano Mancuso, Alessandra Viola, 2018
Intelligence
des plantes : les secrets de la « cognition végétale »,
paru le 22 novembre 2017 sur Sciences & Vie. https://www.science-et-vie.com/archives/revelations-sur-l-intelligence-des-plantes-elles-pensent-22921.
Crédit photo : The bee orchid, Ophrys apifera ; Natural History
Museum
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