« Les êtres humains ont transformé le corps humain pour survivre un monde pollué. Mais quelque chose m’appelle de façon passionnelle au paysage que j’ai vu, la fin de la corruption. Le monde renaît. Même si nous ne pouvons pas tolérer la pureté, même au moment au moment où on est exposés, nous crachons du sang de nos poumons, tout comme les oiseaux migrent, nous vivrons et revivrons. »
Le film de Hayao Miyazaki est un classique de l’animation nippone, et les contextes naturels et écologistes que l’on y retrouve sont tout à fait voulus. Pourtant, un deuxième dialogue par le même auteur fait son apparition, et cela même avant la production de son premier film. C’est le manga Nausicaä de la Vallée du Vent par Hayao Miyazaki qu’on se propose d’étudier dans cette partie, et plus précisément, les liens qui unissent les deux œuvres de cet auteur Japonais. Y trouve-t-on le même discours, ou alors l’auteur se permet-il de modifier une partie du message qui va amener une ultime remise en question ?
Comparaisons de premier plan sur la même temporalité
Afin de puiser dans un maximum d’informations, on se propose dans un premier temps d’explorer les différences et les ressemblances entre le manga et le film d’animation, mais en conservant la même temporalité (c’est à dire, d’arrêter l’analyse du manga là où s’achève le film). Ainsi, on pourra détailler ce qui a été modifié par l’auteur lors de la réalisation du film en gardant le même contexte principal de l’histoire, puisque théoriquement, Miyazaki aurait cherché à faire passer le même message. De plus, la publication de nouveaux tomes du manga après la sortie du film ont permis à l’auteur de revisiter certains points ou même de le faire changer d’avis, et c’est justement ce type de raisonnement que nous voulons éviter dans cette première analyse.
Un contexte d'introduction préservé dans son intégralité
Dans l’annexe de son essai, Viktor Eikmann nous fait bien comprendre que le film et le manga devraient être perçus comme deux entités totalement indépendantes de par les nombreuses différences entre les deux. Il est commun que les films d’animations japonais soient une version raccourcie de leur prédécesseurs sur papier, mais ici ce n’est pas exactement le cas. Pourtant, le contexte général de l’oeuvre, avec la présentation du fukai, la forêt toxique, ou bien encore des événements précédents apocalyptiques, est présenté de façon très similaire, et le lecteur/spectateur aura la même impression d’invasion rancunière de la part d’une nature renaissante. Dans le film, cela se passe lors du générique, où les informations nous sont distribuées à l’aide d’anciennes peintures et de flashbacks (avec l’introduction des Dieux Guerriers par exemple, responsables de la destruction des civilisations). C’est donc un début similaire dans les deux cas, et ces deux introductions à l’univers de Nausicaä ont un but en commun : décrire la fukai comme étant opposée à ce qui est humain et quotidien, étant quelque chose d’incertain et d’inconnu, ce qui renforce l'idée de nature sauvage qui se rebelle contre l’humanité comme punition divine, ou alors une personnification de la Terre elle-même. Les insectes et la vie dans la fukai sont représentés de manière similaire en général, et la vie pastorale de la Vallée du Vent ainsi que le style impérial de l’empire tolmèque sont aussi des aspects préservés dans leur globalité. Tous ces aspects similaires nous font donc comprendre que Miyazaki souhaite préserver cette introduction originale à un nouvel écosystème qui est inconnu pour les humains, et cela va donc permettre au film de suivre une linéarité assez proche de celle du manga dans ses débuts, racontant alors la même histoire avec les mêmes personnages et traits de caractères. Bien que le contexte exploré soit très similaire, certains détails apparaissent dans le manga et sont absents dans le film, ce qui laisse apparaître des différences au niveau du scénario que Miyazaki souhaitait apporter, et c’est ce qui va être analysé dans la suite.
Les deux Nausicaäs d'Osmond : débuts d'une incompatibilité
Andrew Osmond fait référence au film et au manga comme étant deux Nausicaäs, et ce pour les raisons suivantes : il faut retenir que la morale de l’histoire dans le film laissait transparaître à l’époque une pensée écologiste de la part de l’auteur, et donc que la trame, les événements ainsi que le climax de l’histoire servent une pensée extérieure bien plus grande qu’une simple histoire de science fiction. Ainsi, la trame dans le film tourne autour de l’invasion des troupes de Kushana et la volonté de cette dernière de faire revivre un Dieu Guerrier pour détruire l’envahisseur naturel, et pourtant mortel : la fukai. D’un point de vue environnemental, et si le spectateur décide d’associer les valeurs de Nausicaä comme étant celles à suivre, cela fait de Kushana et son empire les antagonistes de l’histoire, qui souhaitent détruire une nature inconnue et dangereuse sans essayer de la comprendre, ou de vivre avec elle. Au début du film, avec une première scène montrant une ville dévastée et pétrifiée à cause de ce que Maître Yupa appelle la fukaï, le spectateur comprend vite que la fukai est bel et bien hostile à l’être humain, et les enjeux environnementaux ainsi que les dilemmes écologiques qui vont se poursuivre tout le long du film sont ancrés dès le départ. Le manga installe pourtant quelques barrières et reste fidèle au scénario proposé par Miyazaki avant la production du film, mais ne contredit pas pour autant toute la morale écologique qu’il y a derrière, du moins pas dans le premier tome. Pour donner quelques exemples, la Vallée du Vent ne se fait pas envahir par l’empire tolmèque, mais est dès le début un village sous l’autorité tolmèque, et les plans de Kushana ne se situent pas au centre de la trame principale : ces différences apportent donc un côté plus politisé au contexte pastoral de la Vallée du Vent, et l’amorce environnementaliste est ici absente pour faire place à une narration plus diplomatique. Les pouvoirs psychiques de Nausicaä sont davantage développés dans le manga, ce qui fait que son empathie et sa diplomatie face à la nature en relèvent davantage d’une spécificité purement génétique qui se rapproche bien plus de la science-fiction que d'une pensée environnementaliste. Finalement, le bébé Ômu qui apparaît sans contexte vers la fin du film comme élément naturel déclencheur de la colère de son espèce est présenté dans le manga comme étant une création biologique humaine, ce qui ajoute à la fukai une dimension scientifique d’altération qui pousse la morale vers une vision plus moderne de l’environnementalisme : la fukai reste hostile aux humains, mais cela n’empêche pas son altération, alors que dans le film, cette nature hostile est présentée comme étant absolument étrangère, presque extraterrestre aux humains.
Les différences les plus marquantes
Au delà de simples détails, des bouts d’histoires sont parfois totalement modifiés pour venir apporter de nouveaux contextes ou de nouveaux enjeux au cours de l’histoire. Le principal changement est la mort de Nausicaä : elle meurt dans le film écrasée par la foule d’Ômus imparables (c’est d’ailleurs la mort de la princesse qui finit par stopper leur élan), pour ensuite être ressuscitée par eux grâce au pouvoir guérisseur de leur tentacules, pouvoir associée à la nature. Ce deus ex machina permet de renforcer l’aspect messianique de l'héroïne qui a longtemps été exploré avec l’apparition de flashbacks ou d’illusions qui montrent Nausicaä entourée d’un grand champ naturellement doré, représentant probablement le blé, jugé comme étant un élément très apprécié du naturel. En revenant à la vie, elle se tient debout sur un champ doré de tentacules d'Ômus, et c’est elle qui vient apporter la morale de l’histoire. Dans le manga, Nausicaä ne meurt pas, et cet aspect messianique et négligé : la morale n’est pas apportée au lecteur de la même manière, ce qui peut sembler logique puisque ce n’est en aucun cas la fin de l’histoire, contrairement au film. De plus, les pages grisâtres du manga, selon Eikmann, ne permettent pas de montrer la fukai dans toute sa splendeur, et donc le lecteur s’y attachera moins. Dans le film, une grande partie du budget d’animation a été dépensé lors de l’animation de la forêt et de ses insectes, ce qui permettait au spectateur de se rendre compte de l’aspect merveilleux que représentait la nature dans l’univers de Nausicaä. En conclusion, ce sont ces différences que présentent Osmond et Eikmann qui ne permettent pas de considérer le film et le manga de la même manière : l’un est une première création de science-fiction par Miyazaki, avec certes quelques touches d’inquiétudes environnementalistes, l’autre est un film d’animation qui met au centre du déroulement de l’histoire un contexte écologique bien plus marqué, et bien plus frappant pour le spectateur. Ce sont ces priorités, par moment incompatibles, qui ont poussé les changements au niveau du script lors de la réalisation du film lorsqu’il s’agissait de créer une transcription d’une histoire déjà parue sous forme de manga.
Une nouvelle perspective liée aux relations : une remise en question
Si nous décidons de pousser l’analyse un peu plus loins avec le manga, nous pourrons nous apercevoir que certains choix scénaristiques entrent en totale contradiction avec les propos du film. La continuation de publication de nouveaux tomes par Miyazaki même après la sortie du film à succès en sont la cause. Il est difficile de croire que Miyazaki savait comment allaient se terminer les aventures de Nausicaä lors de la réalisation du film d’animation, il est donc normal que le manga ne suive pas les mêmes idées instaurées par le film. Ce sont surtout les révélations et les retournements de situations qui vont venir tout changer dans le manga, et il est nécessaire de continuer à le lire pour en découvrir les détails et répondre aux questions qui ont été délaissées lors du visionnage du film. C’est de cela que nous allons parler dans les parties qui suivent pour en conclure sur les apports du manga dans l’histoire de Nausicaä.
Les révélations : une vérité surprenante
Le manga continue de faire avancer la narration et l’histoire en ce qui concerne les aventures de Nausicaä, et lors de ses aventures, elle va apprendre de nouveaux détails en ce qui concerne la fukai et la nature en général qui n’ont jamais été explicités dans le film. Cela commence lorsque Nausicaä découvre au sein de la fukai une partie de la nature qui ressemble étrangement à la nature pré-apocalyptique de son monde : des espèces alors éteintes s’y retrouvent, et la vie reprend son cours originel. De plus, avec l’apparition d’une tribu qui habite la fukai, la construction « anti-hommes » de la forêt disparaît peu à peu pour laisser place à une toute autre réalité que nous allons analyser plus tard, mais qui permet de renforcer cette idée d'altération de la nature par les humains, techniques que cette même tribu utilisera afin de survivre. En effet, tout ce qui leur permet de survivre quotidiennement leur est donné par la fukai elle-même, et certains possèdent même des pouvoirs qui s’effacent lorsqu'ils sortent du monde connu de Nausicaä. Ce n’est que lorsque Nausicaä apprend que des éclaireurs étaient partis explorer les zones purifiées de la fukai, et qu’ils ne sont jamais revenu, que l’ultime révélation du manga fait son apparition : tous les êtres vivants, en ce qui concerne les humains, les insectes et la fukai sont en réalité des modifications génétiques voire même des créations des anciens humains. Selon Eikmann, cela permet de faire apparaître en premier plan une deuxième mort de la nature et du naturel : non seulement la nature a été détruite lors de la guerre flamboyante apocalyptique qui a décimé la plupart des populations, mais elle a été remplacée par une nature artificielle, totalement contrôlée par les êtres humains du début à la fin. Du moins c’est la réalité que cherche à nous faire comprendre Miyazaki puisque, nous le verrons plus tard, Nausicaä prendra un peu de recul vis-à-vis de ces révélations. Ainsi, les tribus et les empires, pouvant jusqu’ici survivre dans le monde extérieur, sont en fait entourés de miasmes toxiques qu’ils sont capables de respirer afin d’assurer leur survie : ils ne peuvent, en revanche, respirer ou boire de l’air ou de l’eau purifiée, ce qui nous fait comprendre que le rôle principal de la fukai est de purifier la terre afin de laisser place à une nature dans laquelle pourront vivre les humains prédestinés à cet effet. C’est d’ailleurs une nouvelle divinité, le Tombeau, qui tient le même discours devant la princesse : il est révélé dans le manga que les Dieux Guerriers sont en réalité très intelligents (il faut préciser que l’apparition du Dieu Guerrier est tardive dans le manga, contrairement au film où il apparaît pour arrêter l’invasion des Ômus, sous un rôle alors totalement différent), et c’est aussi le cas pour la Tombeau. Lors de sa discussion avec notre héroïne, il lui avoue qu'il garde en sa possession toute une variété d’être vivants « originaux » qu'il lâchera une fois la terre purifiée et une fois l’espèce humaine d'aujourd'hui, donc les semblables de Nausicaä, éteinte. La réaction de Nausicaä va nous permettre de faire la transition entre les révélations et les réelles remises en question de la part de l’héroïne dans le manga.
La prise de conscience et les décisions
Avant de finaliser notre analyse de la discussion entre le Tombeau et Nausicaä, regardons dans un premier temps la réaction de Nausicaä lorsqu’elle apprend le véritable rôle de la fukai : puisqu'elle se rend compte que l’ultime fonction du « naturel » dans son monde est en réalité un projet d’origine humaine, et non pas dérivée d’une sélection naturelle que Nausicaä jurait de protéger. Eikmann nous fait donc part de sa réaction lorsqu’elle s’exclame sur le fait que « toute son existence est contraire aux lois de la nature ! », mais elle finit tout de même par se rattacher au fait que la fukai reste toujours pour elle quelque chose de sacré. Telle est la principale remise en question de la part de Nausicaä : le personnage est suffisamment intelligent et bienveillant pour simplement refuser de croire que la réalité de la fukai est une création humaine depuis le début, mais pourtant, son existence et ses valeurs ne s’effondrent pas pour autant, même si elle avoue se trouver perturbée et en quelque sorte perdue vis-à-vis de ces révélations. C’est en quelque sorte ce rattachement personnel de Nausicaä à la fukai et à son écosystème que l’on retrouve dans le film qui permet à l’auteur de lui attribuer une sorte de foi en son importance et en son existence : les révélations et les explications sont là pour apporter une nouvelle dimension scientifique qui signerait l’ultimatum pour les semblables de Nausicaä qui sont voués à la disparition. Mais Nausicaä décide de croire encore et toujours au fait que l’apparition de la fukai, son expansion ainsi que la création de toutes les espèces d’insectes ne peuvent pas être totalement sous le contrôle humain. C’est donc cette idée que l’humain est responsable de l’origine, mais non du développement de la vie, qui va permettre à Nausicaä de faire face aux commentaires du Tombeau en ce qui semblerait être un rattachement Shintoïste de la part de Hayao Miyazaki. En effet, Nausicaä croit que le Tombeau ment et qu'il garde en sa possession des êtres incapables de commettre des erreurs du passé qui ont poussé à leur extinction, ce qui lui permettrait de recréer une civilisation qui a perdu en profondeur sentimentale afin de préserver une sorte de paix construite de A à Z. Opposée à cela, Nausicaä décide de laisser une chance à la fukai, de faire confiance en la profondeur mentale des Ômus et de détruire le Tombeau dans un acte jugé par son adversaire comme étant « nihiliste ». Nausicaä ne croit pas aveuglément que son espèce va s’en sortir et qu’elle va survivre, mais elle lui laisse une chance de vivre dans l’instant présent, et de laisser à la nature le choix de préserver ou non la vie humaine. C’est en quelque sorte ce sentiment qu’Osmond retrouve dans la pensée de Hayao Miyazaki : les actes de Nausicaä ne sont pas clairs et peuvent même être dépourvus de sens pour un lecteur venant du continent Européen ou Américain, mais pour la culture Nippone, la nature est bien plus imprévisible que ce que peut croire l’être humain. Ainsi, Nausicaä donne à la nature ce qui lui appartenait déjà en quelque sorte dans le début du manga et dans le film, le choix de décider ce qu’il adviendra du futur de la planète, et ce purement par des caractères héréditaires naturels, même si l’origine de la fukai est en réalité artificielle. C’est cette prise de décision qui est centrale et fondamentale dans le manga, et cette réponse aux révélations de la part de l’héroïne entre en résonance avec les sentiments shintoïstes toujours partagés par Miyazaki.
À la fin de son mémoire de maîtrise, Gersende Bollut prévient le lecteur sur les différentes visions que peuvent avoir une personne d’origine Nippone et une personne venant de l’Occident. Il précise que, bien que les analyses qu’il ait faites soient majoritairement soutenues par des observations objectives et logiques, cela ne permet pas toujours d’expliquer certaines décisions scénaristiques, et faire des hypothèses supplémentaires peut parfois faire dévier le lecteur de la vérité. Cela peut expliquer les actions de Nausicaä face aux fortes révélations dans le manga, et sont caractéristiques d’une pensée shintoïste liée pourtant à une nature artificielle. D’un autre côté, nous avons montré que la comparaison entre le manga et l’animé était très limitée puisque leur but et le message porté ne sont pas les mêmes et ne touchent pas vraiment le même public. Le film porte une morale écologique et environnementaliste bien plus importante, et le manga satisfait plus des scénarios proches de ceux de la science-fiction, avec en plus des messages véhiculés différents et parfois mêmes propres à la culture nippone. Ces ressemblances et différences sont finalement représentatives des décisions et volontés propres à Hayao Miyazaki lors de la création de ces deux oeuvres distinctes, mais liées dans une étude des relations entre l’homme et la nature.
Avant de finaliser notre analyse de la discussion entre le Tombeau et Nausicaä, regardons dans un premier temps la réaction de Nausicaä lorsqu’elle apprend le véritable rôle de la fukai : puisqu'elle se rend compte que l’ultime fonction du « naturel » dans son monde est en réalité un projet d’origine humaine, et non pas dérivée d’une sélection naturelle que Nausicaä jurait de protéger. Eikmann nous fait donc part de sa réaction lorsqu’elle s’exclame sur le fait que « toute son existence est contraire aux lois de la nature ! », mais elle finit tout de même par se rattacher au fait que la fukai reste toujours pour elle quelque chose de sacré. Telle est la principale remise en question de la part de Nausicaä : le personnage est suffisamment intelligent et bienveillant pour simplement refuser de croire que la réalité de la fukai est une création humaine depuis le début, mais pourtant, son existence et ses valeurs ne s’effondrent pas pour autant, même si elle avoue se trouver perturbée et en quelque sorte perdue vis-à-vis de ces révélations. C’est en quelque sorte ce rattachement personnel de Nausicaä à la fukai et à son écosystème que l’on retrouve dans le film qui permet à l’auteur de lui attribuer une sorte de foi en son importance et en son existence : les révélations et les explications sont là pour apporter une nouvelle dimension scientifique qui signerait l’ultimatum pour les semblables de Nausicaä qui sont voués à la disparition. Mais Nausicaä décide de croire encore et toujours au fait que l’apparition de la fukai, son expansion ainsi que la création de toutes les espèces d’insectes ne peuvent pas être totalement sous le contrôle humain. C’est donc cette idée que l’humain est responsable de l’origine, mais non du développement de la vie, qui va permettre à Nausicaä de faire face aux commentaires du Tombeau en ce qui semblerait être un rattachement Shintoïste de la part de Hayao Miyazaki. En effet, Nausicaä croit que le Tombeau ment et qu'il garde en sa possession des êtres incapables de commettre des erreurs du passé qui ont poussé à leur extinction, ce qui lui permettrait de recréer une civilisation qui a perdu en profondeur sentimentale afin de préserver une sorte de paix construite de A à Z. Opposée à cela, Nausicaä décide de laisser une chance à la fukai, de faire confiance en la profondeur mentale des Ômus et de détruire le Tombeau dans un acte jugé par son adversaire comme étant « nihiliste ». Nausicaä ne croit pas aveuglément que son espèce va s’en sortir et qu’elle va survivre, mais elle lui laisse une chance de vivre dans l’instant présent, et de laisser à la nature le choix de préserver ou non la vie humaine. C’est en quelque sorte ce sentiment qu’Osmond retrouve dans la pensée de Hayao Miyazaki : les actes de Nausicaä ne sont pas clairs et peuvent même être dépourvus de sens pour un lecteur venant du continent Européen ou Américain, mais pour la culture Nippone, la nature est bien plus imprévisible que ce que peut croire l’être humain. Ainsi, Nausicaä donne à la nature ce qui lui appartenait déjà en quelque sorte dans le début du manga et dans le film, le choix de décider ce qu’il adviendra du futur de la planète, et ce purement par des caractères héréditaires naturels, même si l’origine de la fukai est en réalité artificielle. C’est cette prise de décision qui est centrale et fondamentale dans le manga, et cette réponse aux révélations de la part de l’héroïne entre en résonance avec les sentiments shintoïstes toujours partagés par Miyazaki.
À la fin de son mémoire de maîtrise, Gersende Bollut prévient le lecteur sur les différentes visions que peuvent avoir une personne d’origine Nippone et une personne venant de l’Occident. Il précise que, bien que les analyses qu’il ait faites soient majoritairement soutenues par des observations objectives et logiques, cela ne permet pas toujours d’expliquer certaines décisions scénaristiques, et faire des hypothèses supplémentaires peut parfois faire dévier le lecteur de la vérité. Cela peut expliquer les actions de Nausicaä face aux fortes révélations dans le manga, et sont caractéristiques d’une pensée shintoïste liée pourtant à une nature artificielle. D’un autre côté, nous avons montré que la comparaison entre le manga et l’animé était très limitée puisque leur but et le message porté ne sont pas les mêmes et ne touchent pas vraiment le même public. Le film porte une morale écologique et environnementaliste bien plus importante, et le manga satisfait plus des scénarios proches de ceux de la science-fiction, avec en plus des messages véhiculés différents et parfois mêmes propres à la culture nippone. Ces ressemblances et différences sont finalement représentatives des décisions et volontés propres à Hayao Miyazaki lors de la création de ces deux oeuvres distinctes, mais liées dans une étude des relations entre l’homme et la nature.
Sources :
COMPARAISONS DE PREMIER PLAN SUR LA MÊME TEMPORALITÉ
- Eikman, Viktor. 2007. « Meadow and Apocalypse: Constructions of Nature in the Early Works of Hayao Miyazaki ». Advanced Essay (level D), Göteborg University.
- Osmond, Andrew. 1998. « Nausicäa and the Fantasy of Hayao Miyazaki ». SF journal Foundation, Printemps 1998, 72 édition.
UNE NOUVELLE PERSPECTIVE LIÉE AUX RÉVÉLATIONS: UNE REMISE EN QUESTION
- Eikman, Viktor. 2007. « Meadow and Apocalypse: Constructions of Nature in the Early Works of Hayao Miyazaki ». Advanced Essay (level D), Göteborg University.
- Osmond, Andrew. 1998. « Nausicäa and the Fantasy of Hayao Miyazaki ». SF journal Foundation, Printemps 1998, 72 édition.
- Pigot, Pierre. 2013. Apocalypse manga. Presses Universitaires de France. https://doi.org/10.3917/puf.pigot.2013.01.
- Chan, Melanie. 2015. « Environmentalism in Nausicaä of the Valley of the Wind and Princess Mononoke ». In Animated Landscapes: History, Form and Function, p.93-108. Film & Media Studies 2015. New York : Bloomsberry Academic.
- Bollut, Gersende. 2014. « Le traitement du thème de l’homme face à l’environnement dans l’œuvre de Hayao Miyazaki ». Mémoire de Maîtrise, Université Charles de Gaulle Lille 3.
IMAGE
- Miyazaki, Hayao. 1982-1994. Nausicaä de la Vallée du Vent. Française. 7 vol. Grenoble : Glenat
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