Bonjour
à tous et à toutes !
C’est
en appréhendant le sujet des plantes et des femmes, que l’écoféminisme est
apparu comme une évidence. S’il est vrai que les plantes et les femmes sont
liées depuis longtemps, il est d’autant vrai que l’écoféminisme
peut être vu comme la relation la plus revendiquée et la plus forte qui lie la
nature et les femmes de nos jours. De ce constat, est venu l’idée de connaitre ce
mouvement, historiquement récent, et de découvrir quel rapport entre la femme
et la nature l’écoféminisme revendique-t-il.
LES
PLANTES ÉTUDIÉES:
Je
me suis appuyée sur trois semences de plantes différentes qui m’ont chacune
permise de faire fleurir mes connaissances :
🌱 La pensée écoféministe de
Françoise Eaubonne :
Cette
plante est un mémoire cultivé en 2014 par Sonja Papunen. Françoise d’Eaubonne
est considérée comme étant la pionnière de l’écoféministe. Ce mémoire a pour
objectif d’examiner, d’élucider et d’expliquer sa pensée écoféministe dans un
contexte plus global. Pour répondre aux besoins de sa plante, la cultivatrice
va insérer la pensée d’Eaubonne dans un jardin plus large, plus théorique. Elle
nous expose les possibles comparaisons et différences que la pensée d’Eaubonne
rencontre avec celle de la féministe Simone de Beauvoir, puis elle présente
toute la complexité et la subtilité des constructions conceptuelles et
structurelles appliquées d’un point de vue sociologique. Cela va lui permettre
d’introduire les termes de phallocratie et de patriarcat, évoqués par Eaubonne.
La dernière partie est consacrée à l’écoféminisme de nos jours. Elle évoque également
les différents courants existants qu’il y eu au sein de ce mouvement comme
l’écoféminisme culturel, matérialiste ou encore transformatif. Tout cela en
incorporant la pensée d’Eaubonne.
Engrais naturels : Sources diverses et principalement
scientifiques en plus d’une grande partie des ouvrages de Françoise Eaubonne.
Engrais percutant et compétant !
Mauvaises herbes :
Pour un amateur du jardinage, cette plante est une première approche complexe
avec la pensée écoféministe d’Eaubonne, il est donc important de lire ses
œuvres au préalable. De plus, la théorie semble à certains moments prendre le
dessus au point d’oublier le fil conducteur du sujet, ce qui rend la plante
plus complexe à suivre.
Bouton de fleur : Complet
et général, la cultivatrice réussie très bien à mettre sa plante dans un champ
varié qui permet de contextualiser scientifiquement l’écoféminisme et de connaitre,
comprendre et comparer la pensée d’Eaubonne au fil du temps, c’est ce qui en
fait son intérêt. Elle insère aussi la pensée de cette pionnière dans
l’écoféminisme contemporain, tout en nous informant sur les nouveautés
actuelles liées au sujet.
🌳 Pratiques écoféministes : Corps, savoir et
mobilisation :
Marlène
Benquet et Geneviève Pruvost, toutes deux chargées de recherche au CNRS ont
plantées en 2019, un article dans le champ « Travail, genre et
sociétés ». Cette plante à pour couleur l’évolution historique et
géographique de l’écoféminisme avec une pointe de sociologie pour sublimer le
tout. En faisant un point d’introduction sur Françoise d’Eaubonne, les
différents courants et les événements fondateurs qui ont fait éclore ce
mouvement tel que la déforestation au Kenya, ces jardinières ont pour enjeu d’insister
sur les diverses appropriations de l’écoféminisme et d’apporter une approche
historique et sociologique sur l’indissociabilité de la théorie féministe et de
l’expérimentation politique radicale. Dans un premier temps, elles expliquent
quels ont été les éléments perturbateurs qui ont provoqués l’apparition tardive
de l’écoféministe en France comparé à certains pays. Dans un second temps,
elles lient pratiques et expérimentations, montrant que « l’écoféministes
se rapproche de modes d’action anarchistes, zapatistes, altermondialistes »[1] et qu’il
faudrait, grâce à plus d’enquêtes, sortir de ces expérimentations pour enfin
faire entendre pour de bon la voix des femmes.
Engrais naturels : Racines tout aussi tenaces et efficaces qui
assurent la fiabilité de la plante, d’autant plus qu’elles sont en majorité
récentes !
Mauvaises herbes :
un brin de subjectivité qui fait entendre un positionnement dans cet article
qui se veut scientifique, cependant c’est une belle plante !
Bouton de fleur :
Il relate des informations essentielles à la compréhension de l’évolution du
mouvement écoféministe en France plus particulièrement. Court et incisif, il me
parait important de le lire du fait de son fort contenu explicatif.
🌿 Ecoféminisme #2 : Retrouver
la terre | Un podcast à soi :
Nous
avons ici, un podcast, drôle de plante semée par Charlotte Bienaimé en 2019.
Documentariste, productrice et animatrice de radio récompensée, elle intervient
sur multiples sujets de société, elle apparaît tous les mois depuis 2017, sur
Arte avec Un podcast à soi. Retrouver la terre, est la deuxième
partie d’un podcast sur l’écoféminisme. L’intérêt de cette semence, bien
qu’implicite, est de faire découvrir ce mouvement et donc de sensibiliser à
l’écoféminisme. Cette plante offre une grande partie de sa croissance à
permettre aux femmes vivant à l’écart de la société, de faire entendre leur
voix. Elle nous fait prendre contact avec une communauté non mixte, d’abord créée
par des femmes lesbiennes puis petit à petit par des femmes en quête de
reconnexion avec la nature, de connaissance de leur corps et d’affranchissement
du genre masculin. Chaque témoignage raconte les expériences et ressentis des
femmes vis-à-vis de leur communauté, de l’écoféminisme et de leur espérance
pour une société future. Au milieu de cela, commentaires, passages issus de
livre ainsi que des témoignages scientifiques comme ceux de Geneviève Provost,
ancienne fleuriste, et Myriam Bahaffou, cultivatrice en philosophie sont
convoqués.
Engrais naturels : Multiples
engrais sous toutes les formes, livres, témoignages, sites web, spécialistes du
sujet. Un bonheur pour n’importe quelles plantes !
Mauvaises herbes :
100% plante épanouie, 100 % certifiée : un jardinage de qualité !
Rien à déraciner.
Bouton de fleur :
Cette plante donne une approche concrète avec une communauté écoféministe
radicale. Elle donne une idée plus concrète et encore plus globale du fait de
ses sources diverses et permet ainsi de connaitre l’écoféminisme et peut-être
même de s’identifier et de prendre mieux en considération ce que ce mouvement
implique et revendique. En effet, ce podcast est accessible à tous, il
s’éloigne plus de la théorie pour laisser place au réel. Agréable et prenant,
avec une diversité d’écoute, c’est une plante à avoir chez soit au moins une
fois pour essayer.
🍀Ces trois
plantes se complètent dans le sens où elles apportent toutes les trois des
éléments historiques, sociologiques et concrets de ce qu’est l’écoféminisme et
de son évolution dans nos sociétés et dans le milieu scientifique.
De quoi
faire un joli bouquet 🍀
DU COUP
L’ECOFEMINISME C’EST QUOI ?
L’écoféminisme,
vient des deux termes « écologie » et « féminisme ». Cette
combinaison majoritairement employée dans le monde académique est apparue dans
les années 1970 avec l’ouvrage de « Le féminisme ou la mort » de
Françoise d’Eaubonne.
=> THE RACINE : C’est en prévoyant une future apocalypse
écologique causée par la société patriarcale et hiérarchique instaurée depuis
des millénaires, que la pensée novatrice d’Eaubonne sensibilise et alarme sur
l’oppression, l’exploitation, la hiérarchie et les inégalités de la société.
Ainsi l’écoféminisme, selon Eaubonne, remet en question la façon dont les êtres
humains se positionnent entre eux. Elle justifie principalement la logique de
l’écoféminisme par la surpopulation de la terre et l’inégalité des sexes. L’objectif
est d’atteindre « une société basée sur l'égalité des sexes, la
préservation de la nature et l'égalité des peuples : "l'égalité dans la diversité,
non dans la différence ". Le féminisme de Eaubonne n'est pas seulement un
mouvement de libération des femmes : "c'est
toute l'humanité en crise, c'est la mue de l'espèce : c'est véritablement le
monde qui va changer de base "[2]. Dans
ces ouvrages, elles proposent le refondement d’une nouvelle société qui « a
pour base l’idée que l’individu doit avoir la liberté d’organiser sa vie de
manière humaine et digne […] les individus auraient une prise plus forte sur
les questions importantes et vitales de leur vie et de leur communauté »[3] et
« où l’échange pourrait même remplacer le signe monétaire »[4] Cette
jardinière novatrice de son époque va si bien semer sa graine qu’elle va y
faire pousser une forêt !
=> LA FORET :
Bien que l’analyse de Françoise Eaubonne se base sur les sociétés occidentales et
plus particulièrement sur la société française, sa pensée a surtout généré un
grand engouement auprès des pays anglo-saxons dans les années 1980 et 1990. Ceci
s’explique par une préoccupation de plus en plus grande sur « la question
de la domination croisée des femmes et ressources naturelles » [5]et
parallèlement avec certains événements majeurs comme l’accident de la centrale
atomique aux Etats-Unis en 1974. L’apparition tardive du mouvement écoféministe
en France s’explique lui par un contexte géopolitique plus complexe qui a
empêché la création et l’évolution de communauté écoféministe.
Au fil du temps l’écoféminisme devient une véritable
graine scientifique, plusieurs théories, enquêtes et témoignages apparaissent.
De nos jours il se définirait comme « l’ensemble des mouvements et des
théories qui « visent à injecter une conscience féministe au mouvement
environnemental » et à « injecter une conscience environnementale au féminisme
»[6]. En effet,
ils existent plusieurs tiges écoféministes telles que l’écoféministe sociale, spirituel, culturel.
ET
LA RELATION FEMMES/NATURE ?
Dans l’optique du potager de recherche, il
est essentiel de voir le rapport femmes/nature. L’écoféminisme a pour objectif
de déraciner le lierre résistant qu’est la dichotomie femme/nature et
homme/culture qui sous-entend une dominance de la société, de la culture sur la
nature. Cette dichotomie serait à la base de la société patriarcale. Le terme
« nature » est devenu avec la mainmise de l'être humain, un terme
réducteur, évoquant le chaos, l’animalité ou encore le manque d’intelligence.
Cette connotation serait alors utilisée pour légitimer un ordre social et
donc dans un moindre sens un monde patriarcal. En effet, la naturalisation a
souvent justifié dans le passé le racisme ou encore l’homophobie. Selon Myriam
Bahaffou, cela commence lorsque les hommes ont su domestiquer les animaux et
lorsqu’ils ont pris conscience de leur rôle reproducteur, s’accordant ainsi le pouvoir
absolu de reproduction. Un parallèle peut être fait avec l’industrie intensive
animalière où là aussi les hommes contrôlent la maternité des vaches afin de
produire du lait. Il est aussi possible d’évoquer comment l’industrie à travers
le marketing, féminise les animaux et animalise des femmes. Prenons pour
exemple, le nom féminin « montagnarde » donnée à une pizza ou encore
la publicité d’une célèbre marque de viande française qui fait danser le french
cancan à des poulets. C’est pour se débarrasser de cette domination masculine
que des femmes qui vivent dans des communautés non mixtes, essaient et réapprennent
à se reconnecter avec la nature, à connaitre leur corps et à travailler la
terre. Tout cela en respectant la nature afin d’en tirer une force et non une
faiblesse comme le sous-entendrait le monde patriarcal.
LE BOUQUET
FINAL 💐
Pour
conclure, l’analyse de toutes ces plantes ont créé un bouquet haut en couleur
qui bien que comportant quelques défauts, apporte un effet de fraîcheur
garantit qui permet de faire fleurir toutes connaissances. La composition est
effectivement une édition limitée qui se complète. De théories à pratiques,
expériences, savoir et histoire, c’est un parfait camaïeu qui illuminera votre
compréhension de l’écoféminisme.
[1] PRUVOST
Geneviève et BENQUET Marlène. Pratiques écoféministes : Corps, Savoir et
Mobilisation. La découverte : « Travail, genre et sociétés »,
Novembre 2019, n° 42, p 27.
[2] PAPUNEN,
Sonja. La pensée écoféministe de Françoise d’Eaubonne. Université de Tampere,
2014, p.3.
[3] Ibid. p.45
[4] Ibid.
p.46
[5] PRUVOST
Geneviève et BENQUET Marlène. Pratiques écoféministes : Corps, Savoir et
Mobilisation. La découverte : « Travail, genre et sociétés », Novembre 2019, n°
42, p.23
[6] Ibid.p.24
SOURCES :
PRUVOST Geneviève et BENQUET Marlène. Pratiques écoféministes : Corps, Savoir et Mobilisation. La découverte : « Travail, genre et sociétés », Novembre 2019, n° 42.
PAPUNEN, Sonja. La pensée écoféministe de Françoise d’Eaubonne. Université de Tampere, 2014.
BIENAIME, Charlotte. Ecoféminisme #2 : Retrouver la terre | Un podcast à soi [podcast]. Arte Radio, 4 décembre 2019, 1h06,11s. Disponible sur : https://www.arteradio.com/son/61662820/ecofeminisme_2eme_volet_retrouver_la_terre_22
SOURCES :
PRUVOST Geneviève et BENQUET Marlène. Pratiques écoféministes : Corps, Savoir et Mobilisation. La découverte : « Travail, genre et sociétés », Novembre 2019, n° 42.
PAPUNEN, Sonja. La pensée écoféministe de Françoise d’Eaubonne. Université de Tampere, 2014.
BIENAIME, Charlotte. Ecoféminisme #2 : Retrouver la terre | Un podcast à soi [podcast]. Arte Radio, 4 décembre 2019, 1h06,11s. Disponible sur : https://www.arteradio.com/son/61662820/ecofeminisme_2eme_volet_retrouver_la_terre_22
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