Comment la figure mythologique d’Artémis et ses symboles exercent-ils une influence sur des représentations concrètes et pratiques d'aujourd’hui ?
Dessin d'Artémis par Eirian
A - Une divinité qui permet le passage nature/culture
1. Une opposition à Apollon
Sœur jumelle d'Apollon, Artémis possède, si l'on puit dire, tous les traits de son frère, mais au féminin. On pourrait presque considérer ces deux Olympiens comme deux figures opposées et complémentaires d'une même entité divine (masculin-féminin, esprit-nature).
De plus, Artémis est identifiée à la Lune, lumière qui brille la nuit, à l'opposé de son frère jumeau Apollon, qui est le dieu du Soleil qui brille le jour. Tous deux s'opposent et se complètent. Apollon symbolise parfaitement le monde tangible, concret des Dieux et la matérialisation de l’esprit, tandis que Artémis est le symbole même de la nature ésotérique et impénétrable.
2. Déesse de l’accouchement...
Connue pour rester invisible et cachée aux yeux des humains, Artémis intervient dans leur monde pour présider aux accouchements. Déesse de la nature farouche, elle sait contrôler la sauvagerie naturelle de l’accouchement. Il est même raconté que, sortie la première du ventre de sa mère, elle l’aida a accoucher de son jumeau Apollon. Au-delà de l’extraordinaire de ce mythe, sa symbolique en est d’autant plus forte : dissimulée dans le monde sauvage, elle intervient dans le monde humain pour les faire passer de la dépendance (dans le ventre de leur mère) à l’indépendance.
3. ...Mais aussi des initiations de la nature vers la culture
De plus, de la symbolique de l’accouchement certains auteurs vont encore plus loin, la rendant déesse des initiations de la nature vers la culture. Puisqu’elle chasse les mauvais hommes retournés à la sauvagerie dans ses forêts, elle punit ceux qui s’écarte de leur nature par son influence sur les accouchements (amenant à des enfants non viables, etc.). A l’inverse, elle récompense ceux qui franchissent leurs initiations avec protection et prospérité. Elle préside ainsi à l’éducation des enfants, de leur passage de la sauvagerie au monde civilisé et culturel.
B - Vers un idéal de pureté qui pose question
1. La forêt vierge et Artémis : quelle similitude ?
Si Artémis est liée à la forêt, il convient de s’intéresser à ce rapport qu’elles entretiennent. On qualifie de « forêt vierge » une forêt qui n’est pas exploitée par l’homme et se développe librement. L’analogie prend alors son sens : Artémis appartient au monde sauvage, et s’oppose en cela à Apollon, son frère jumeau. Elle incarne cette nature qualifiée de « pure » car non explorée par l’homme : elle est le mystère et l’inconnu qui y réside. Si on ne peut l’apercevoir, c’est bien parce qu’elle se cache là où les hommes ne vont pas. Cette métaphore de la forêt impénétrable rappelle évidemment sa virginité, et le lien qui est apparu avec le temps, entre une femme vierge dite plus « naturelle » et proche de cette forêt pure et vierge.
2. Un jour de fête historique, qui célèbre une virginité pure
Dans la Grèce Antique, le jour de fête d’Artémis était le 15 août, afin de célébrer la générosité de gibier qu’elle offrait aux hommes dans ses forêts, mais aussi pour remercier les accouchements qu’elle a accompagnés, et fêter sa virginité. L’évolution du jour de fête d'Artémis permet de voir la grande influence que cette dernière a sur notre histoire, mais aussi quelle(s) valeur(s) elle véhicule. En effet, le 15 août est devenu le jour de l’Assomption de Marie : jour de fête d’une autre femme vierge liée à la croyance. L’évolution de ce jour de fête permet de voir combien le lien virginité/femme pure perdure dans le temps, mais évolue dans la forme autour de nouvelles valeurs. L’étude de ce jour encore fêtée de nos jours démontre que la célébration de la femme pure et vierge reste fondée, et que ce lien s’est enracinée dans des croyances et mythes qu’il convient de recontextualiser, pour ne pas lier la virginité (un fait) à la pureté (une qualité discutable).
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