Partie 2 : Les OGM : une solution problématique, un sujet de débat


OGM, un communiqué de France Nature Environnement du 22 février ...

A) Début des contestations.
Dès les années 1980, les biotechnologies végétales ont fait l’objet d’une opposition de la part des mouvements de défense de la nature avant même que les premières réalisations n’aient vu le jour. En France, dès 1987, les organisations écologistes ont exprimé vigoureusement leur opposition aux premiers essais au champ de PGM (Plantes Génétiquement Modifiées) menés par l’INRA (Institut National de la Recherche Agronomique).
1/ Premiers scandales médiatiques
En août 1998, Arpad Psztai, dont le manuscrit venait d’être refusé pour publication dans une revue scientifique, déclarait, dans une interview à la BBC, que des rats nourris avec des pommes de terre transgéniques présentaient des anomalies de développement. Ces affirmations, scientifiquement contestées mais fortement médiatisées, ont engagé la Grande-Bretagne en février 1999 dans une attitude durable de rejet des PGM. Au printemps de la même année, la revue Nature publiait un article qui affirmait que le papillon Monarch était menacé, au cours de ses migrations entre le Canada et le Mexique, par la toxicité du pollen de « maïs Bt » cultivé dans les plaines du « Middle West » des États-Unis. Une polémique de grande ampleur a été déclenchée par les écologistes.
2/ Premières réactions politiques
Ces deux événements médiatiques ont trouvé un écho dans l’opinion et ont eu pour conséquence de modifier l’attitude de l’Union européenne à l’égard des PGM. En juin 1999, le gouvernement français décidait, à la demande des organisations écologistes, de proposer à l’Union européenne de suspendre les autorisations de culture et de consommation de nouvelles variétés végétales génétiquement modifiées tant qu’un seuil d’acceptabilité n’aurait pas été défini et qu’une réglementation relative à l’étiquetage et à la traçabilité des OGM n’aurait pas été élaborée. Cette décision de l’UE marque la chute du nombre d’essais réalisés sur le territoire de l’Union entre 1999 (près de 250) et 2002 (moins de 50). 

B)  Effets des PGM sur la santé
1/ Toxicité des PGM : évaluations et doutes 
L'évaluation de la toxicité potentielle des PGM est une tâche difficile, car aussi étonnant que cela puisse paraître, les scientifiques ne disposent pas d’une méthodologie adaptée à l'évaluation de la sécurité sanitaire des alimentaires. Devant cette difficulté, des réunions internationales de scientifiques ont conduit, à partir du début des années 1990, à proposer une approche qui consiste à faire des comparaisons entre la PGM et ce qui est appelé le « comparateur », une plante qui doit posséder des gènes aussi identiques que possible à ceux de la PGM pour différentes caractéristiques : les phénotypes (aspect extérieur), les performances agronomiques (rendement, mais aussi résistance aux ravageurs, aux maladie, etc.), les caractéristiques de composition (nutriments, composés toxiques ou antinutritionnels naturellement présents) et l’acceptabilité des produits par les animaux.  Les résultats des tests de toxicologie peuvent conduire à s’interroger sur les effets potentiels sur la reproduction, le développement ou encore le comportement par exemple. Des études complémentaires peuvent alors être entreprises ; mais en général, le développement de la PGM concernée sera interrompu en raison du coût de ces études. Ces différents tests toxicologiques sont capables de détecter une toxicité marquée, y compris des aliments, mais ils manquent de sensibilité et de spécificité pour mettre en évidence des effets discrets. La mise en oeuvre de cette méthodologie reconnue officiellement n’a pas mis en évidence d’effets négatifs des PGM reconnus par la communauté scientifique. En revanche, le doute plane encore et les questions concernant l’impact des OGM sur notre santé sont toujours d’actualité. En effet, plusieurs questions sont toujours sans réponses précises : la dégradation des OGM au cours de la digestion, les risques d’allergie, les effets des OGM sur la nutrition humaine, etc.
2/ Quels effets sur notre organisme ? 
L’ingestion de produits contenant des OGM crée toujours une incertitude sur la présence d’une substance indésirable qui pourrait présenter des dangers pour l’homme ou l’animal. Les modifications transgéniques peuvent avoir pour but de conférer aux plantes des résistances aux agents pathogènes et une tolérance à des herbicides spécifiques, et il semble donc rationnel de se demander ce que produira sur notre organisme l'ingestion de ce type de produits. Des recherches sont toujours en cours pour apporter des réponses claires à cette inquiétude, et elles devraient notamment tenir compte : des caractéristiques physiologiques et morphologiques des nourrissons, des enfants, des personnes âgées, des femmes enceintes ou allaitant, et des personnes souffrant de maladies chroniques ; des effets de changements qui seraient dus à la consommation d'aliments génétiquement modifiés dans un régime alimentaire équilibré ; ou encore des effets du stockage, du traitement, ou de la cuisson sur les valeurs nutritionnelles de ces produits génétiquement modifiés.
3/ Dégradation des OGM au cours de la digestion 
Dans l'alimentation, les OGM se présentent sous deux formes principales. D’une part, il y a les produits frais (fruits, légumes, etc.) : les gènes modifiés sont directement soumis aux enzymes digestives. D’autre part, il y a les produits transformés ou dérivés (concentré de tomates, farine, etc.) : le procédé de fabrication peut dénaturer les molécules (transgéniques ou non). Concernant la dégradation des OGM au cours de la digestion, elle se fait, comme pour tous les autres aliments, de deux manières dans le tube digestif : soit de façon mécanique (par la mastication, le brassage dans l'estomac), soit de façon chimique (sous l'effet des enzymes digestives, qui dégradent les aliments et les transforment en composés simples (acides aminés, acides nucléiques, etc.). Une fois ces traitements chimiques et mécaniques effectués, il est très peu probable qu'une molécule reste fonctionnelle dans l'organisme après digestion. Pour savoir si toutes ces dégradations suffisent à détruire une molécule transgénique, des tests de survies gastrique et intestinale ont été proposés mais ils posent des problèmes pratiques majeurs : il faut disposer d'une grande quantité de molécules pour faire ces tests, mais il est difficile d'en extraire assez à partir de la plante ; les modifications des protéines que l'on pourrait observer dépendent de l'hôte, ce qui peut modifier leur toxicité ; enfin, dans la réalisation de ces tests, on ne prend pas toujours en compte les personnes à capacité digestive réduite (personnes âgées, enfants) qui sont pourtant plus sensibles aux intoxications.

C) Effets des PGM sur l’environnement
1/ Pollen, croisements et contamination
Le transgène est présent dans l’ensemble des cellules d’une PGM. Il est donc présent également dans le pollen. Or le pollen est poussé par le vent ou emporté par des insectes pollinisateurs. Ce phénomène naturel, la pollinisation croisée, peut entraîner une dissémination du transgène. On parle aussi de contamination quand ce pollen issu de la PGM féconde une plante apparentée, sexuellement compatible. Selon les plantes et les régions agricoles, les possibilités de croisements sont plus ou moins larges. Ainsi, si en Europe un maïs génétiquement modifié ne peut se croiser qu’avec un autre maïs, ce n’est pas le cas du colza qui peut se croiser avec de très nombreuses plantes apparentées, comme la moutarde ou la ravenelle. Cette contamination a pour conséquence le fait qu’une plante génétiquement modifiée qui tolère un herbicide puisse transmettre cette tolérance à des plantes de la même famille. Ainsi, les plantes adventices (plus communément appelées les « mauvaises herbes ») acquièrent progressivement une résistance à ces herbicides, donc les agriculteurs doivent continuellement se procurer de nouvelles PGM tolérant d’autres herbicides ou supportant un spectre de toxicité plus important. 
2/ L’usage de PGM « insecticide » provoque des résistances
            Les plantes Bt, qui produisent en permanence une protéine insecticide, posent de nombreux problèmes écologiques relativement bien documentés. Tout d’abord, la protéine Bt produite vise, en théorie, un parasite ou une famille de parasites. Si la PGM fonctionne bien, la population « parasite » peut disparaître. Elle peut alors laisser la place à une autre population, auparavant parasite mineur. L’éradication totale d’une population n’est donc pas un objectif pertinent en soi.
            Ensuite, plusieurs études ont montré que les PGM Bt ne sont pas nocives uniquement pour les insectes cibles. Elles peuvent aussi affecter d’autres insectes (dits non-cibles) qui jouaient un rôle dans l’équilibre écologique global en étant, par exemple, prédateur de parasites. Il en est ainsi de la coccinelle, des puces d’eau ou encore des écrevisses.
            Enfin, l’utilisation en continu de ces PGM Bt favorise l’apparition, chez les insectes cibles, de la résistance à la protéine insecticide. De telles populations d’insectes résistantes rendent caduques les PGM Bt et obligent les agriculteurs à utiliser d’autres PGM produisant plusieurs protéines insecticides, vendues par les mêmes entreprises de biotechnologie, ou alors à retourner aux insecticides chimiques.
3/ Une biodiversité menacée, notamment dans les bassins d’origine des espèces
En 2005, la Société anglaise Royale des Sciences a publié des résultats d’un vaste programme d’évaluation des impacts sur l’environnement de cultures de plantes transgéniques. Ces résultats montraient que dans les champs de culture de colza transgénique tolérant un herbicide, la quantité de dicotylédones (mauvaises herbes) ne représentait qu’un tiers de celle retrouvée en culture conventionnelle du fait des traitements herbicides. Or, ces plantes produisent les graines les plus attrayantes pour plusieurs espèces d’oiseaux (alouettes, bouvreuils...) ainsi que des pollens appréciés des abeilles et des papillons. En conséquence, les chercheurs avaient constaté que les champs « transgéniques » abritaient moins d’abeilles et de papillons, et ils s’inquiétaient d’un effet possible sur les oiseaux. Par ailleurs, le Mexique est le berceau génétique du maïs, l’Inde de l’aubergine, l’Europe du colza, etc. : une contamination de ces plantes par des transgènes dans leur berceau d’origine pourraient nuire grandement à la biodiversité. Plusieurs organisations demandent qu’a minima les PGM soient interdites dans les zones d’origine des cultures transformées.
4/ Autres exemples d’effets néfastes sur l’environnement
Il a aussi été montré que le principe actif de l’herbicide Roundup, le glyphosate, peut avoir des effets négatifs sur du soja transgénique modifié pour le tolérer. Ce soja génétiquement modifié aurait une activité de photosynthèse moindre. 
Les abeilles sont également exposées à ces PGM et des répercussions négatives en sont visibles : diminution de leur capacité à associer une odeur à une source de nectar ; diminution des activités de butinage ; etc.

Bibliographie :
A)
BASSET, Xavier, LE GALLI, Michaël, MIKE, La Guerre des OGM, Paris, Editions Delcourt, 2009
DATTEE, Yvette, PELLETIER, George, « Comment a-t-on abouti à un refus de la culture des PGM ? », in DATTEE, Yvette, PELLETIER, GEORGE, Pourrons-nous vivre sans OGM ?, Paris, Editions Quae, 2014, p. 190-192
OURY, Jean-Paul, La querelle des OGM, Paris, Presses Universitaires de France, 2006
TESTOT, Laurent, « Le défi de l'Anthropocène », in Les Grands Dossiers des Sciences Humaines, Vol. 25, n° 12, 2011, p. 21-21
ZIN, Jean, « L’Anthropocène nous rend responsables du monde », in EcoRev', Vol. 44, n° 1, 2017, p. 24-29

B)
Impact des OGM sur la santé [En ligne], in Futura-Sciences. Disponible sur <https://www.futura-sciences.com/sante/dossiers/genetique-ogm-tour-horizon-complet-223/page/3/
KUNTZ, Marcel, Les OGM, l’environnement et la santé, Paris, Editions Ellipses, 2006

C)
FLEURY, Philippe, Agriculture biologique et environnement : des enjeux convergents, Paris, Educagri éditions, 2011
MEUNIER, Eric, Les larves de coccinelles sont bien victimes de la protéine Bt du maïs OGM MON810 [en ligne], in Inf’OGM. Disponible sur <https://www.infogm.org/5054-OGM-Mon810-larves-de-coccinelle-victimes-de-la-proteine-Bt>
MEUNIER, Eric, Des effets négatifs du glyphosate sur du soja transgénique le tolérant [en ligne], in Inf’OGM. Disponible sur <https://www.infogm.org/4629-le-glyphosate-perturbe-le-soja-OGM-qui-le-tolere>
MEUNIER, Eric, NOISETTE, Christophe, OGM : impacts de la protéine modifiée Bt sur la faune aquatique [en ligne], in Inf’OGM. Disponible sur <https://www.infogm.org/3447-OGM-impacts-proteine-Bt-faune-aquatique>
NOISETTE, Christophe, OGM : nocifs pour la biodiversité ? [en ligne], in Inf’OGM. Disponible sur <https://www.infogm.org/OGM-nocifs-pour-la-biodiversite>






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